Comment améliorer son bien-être au travail ?
La plupart des gens ont beau aimer leur travail, beaucoup en souffrent. C’est sur ce paradoxe que s’est penché le sociologue Jean-François Dortier dans son dernier ouvrage : « Travail – Guide de survie ». Il tente de comprendre comment notre société en est arrivée là et propose de faire le point sur ce que l’on peut faire pour améliorer les choses. Mode(s) d’Emploi en a tiré 7 conseils pour améliorer son bien-être au travail.
Pression, surcharge de travail, urgences, évaluations, conflits, management oppressant… Les contraintes qui pèsent sur les travailleurs vont jusqu’à altérer leur santé. Le burn-out est devenu le mal du siècle. A travers une enquête menée dans plusieurs secteurs professionnels, Jean-Philippe Dortier propose un nouvel éclairage sur une thématique devenue récurrente aujourd’hui : le mal au travail. Ce dernier n’est pas une fatalité, et s’il n’existe pas de solution miracle, chaque individu dispose de marges de manoeuvre pour se sentir mieux au travail.
Comment agir ?
Lâcher prise
Plus qu’une simple injonction, le lâcher-prise est une technique de méditation et de relaxation fondée sur l’instant présent. Appliqué au travail, il invite l’individu à « travailler différemment » en ne faisant qu’une seule chose à la fois.
Derrière l’expression, il s’agit en fait de renoncer à tout contrôler et relâcher la pression. Difficile quand on aime son travail… Le terme peut énerver certains et ses détracteurs ironiseront avec un classique « plus facile à dire qu’à faire ». Peu d’entre nous sont finalement prêts à baisser leurs exigences, et à renoncer face aux difficultés, voire à déléguer… Et pourtant.
Technique de relaxation, posture existentielle consistant à focaliser ses actions sur des buts précis, philosophie de travail… Le lâcher-prise permet surtout de se concentrer sur l’essentiel, de s’engager de manière mesurée. Ainsi, au travail, la méditation en pleine conscience ou « mindfulness » consiste à se retirer quelques minutes dans un endroit calme pour méditer : respirez profondément, ignorez et repoussez les émotions négatives.
Lutter contre la dispersion
« La dispersion au travail déboussole, fatigue et démoralise » rappelle Dortier. Qui n’a pas connu ces fameuses journées durant lesquelles « on n’arrête pas » tout en ayant le sentiment de n’avoir rien fait ?
Les conditions de travail actuelles nous poussent à adopter un comportement multitâches analyse le sociologue. Notre cerveau raffole également de cette diversité selon lui. Stress, fatigue, perte de sens, culpabilité, temps et énergie gaspillés… Les effets négatifs sont nombreux. Mais la dispersion a l’avantage : fini l’ennui lié aux activités répétitives, vive l’adrénaline du dossier urgent et le challenge ! La dispersion peut aussi être source de créativité selon la sociologue Caroline Datchary.
Pourtant, il est possible d’apprendre à apprivoiser son attention. D’après le sociologue J.P Lachaux, il faut pour cela avoir les idées claires sur ses objectifs et sur le résultat que l’on souhaite obtenir en fonction du temps imparti. Pour contrôler son attention, Dortier nous donne 6 conseils :
– savoir par où commencer,
– tenir le cap, rythmer son activité (ménagez-vous des pauses !),
– se déconnecter (oubliez les mails, sms, tweets pendant un instant),
– gérer les imprévus,
– savoir dire non.
Gérer son temps
Un véritable « art de vivre » selon Dortier. Maîtriser son temps, c’est être libre. Forcé d’admettre qu’il a dû potassé quelques manuels de gestion du temps, le sociologue en a tiré plusieurs enseignements.
Il est d’abord nécessaire de définir ses priorités. Etablir une liste et les classer par priorité est une pratique répandue. Mais si votre liste reste sur des « A faire » à bêtement considérés dans l’ordre chronologiquement, la procrastination sera au rendez-vous. Votre do-to doit inclure des tâches « enviables » : c’est à dire du repos, des choses futiles, des tâches qui vous procurent du plaisir. Dortier s’est lui-même appliqué une règle de vie plutôt sympathique : « Consacrer un jour par mois à penser à ce que je veux vraiment faire et consacrer une heure par jour à le faire ». Et couper dans la liste « A faire » explique le sociologue, c’est apprendre à dire non, apprendre à déléguer, apprendre à fermer la porte pour ne pas être dérangé… Il faut ensuite affecter un budget à ses tâches , un temps réaliste. Enfin, il est nécessaire d’aménager son temps pour être plus productif : en ne négligeant pas le travail préparatoire à une tâche par exemple ou en identifiant par exemple les heures de la journée durant lesquelles on est le plus efficace.
S’approprier son travail
Dortier rappelle que disposer d’une marge de manoeuvre au travail est l’une des conditions au bien-être au travail. Ainsi, un même poste de travail peut faire l’objet de différentes manières de travailler selon les individus : c’est ce qu’on appelle l’appropriation du travail. Celle-ci peut se présenter sous plusieurs formes : faire preuve de résistance en freinant « la cadence », faire preuve de stratégie, affirmer son identité au travail (en accommodant le travail à sa sauce), ou encore exercer son activité comme on l’entend.
Travailler chez soi
Gain de temps, d’argent, de productivité…Le télétravail comporte des avantages indéniables. 15 % des actifs le pratiquent aujourd’hui. 85 % pensent que le télétravail est une bonne chose, et 95 % chez ceux qui le pratiquent, qui voient également augmenter leur productivité de 25 %.
Ce mode de travail contribue au bien-être des salariés : moins de trajets donc moins de stress, plus de souplesse dans les horaires, une meilleure concentration à ses tâches… La satisfaction est au rendez-vous. Ce qui promet un bel avenir à ce mode de travail, même si cela demande un peu d’organisation pour le travailleur comme pour l’entreprise.
Trouver son rythme et l’imposer
Chacun a son rythme biologique expliquer Dortier : trouver le sien permet de gagner en efficacité et en bien-être. Il est beaucoup question du rythme des enfants, mais qui se préoccupe de celui des adultes s’enquiert le sociologue ? Une étude anglo-saxonne révélait il y a peu que commencer sa journée de travail avant 10 heures s’apparente à de la torture pour les salariés.
Prenez donc votre rythme biologique au sérieux et écoutez votre corps ! D’abord, il faut rappeler que quand le système digestif travaille, tout le reste tend à se mettre au repos. Et inversement, la faim stimule l’éveil rappelle le sociologue. Attention et concentration s’épuisent vite, il est donc recommandé d’alterner séance de travail intense, de travail léger et de repos pour se préserver.
En France, seulement la moitié des actifs respectent des heures de travail fixes (9h-18h). Et beaucoup d’entre nous se laissent déborder par les urgences ou les sollicitations immédiates. Pour une bonne gestion de ses rythmes de travail, il faudrait ainsi « ordonner le temps » selon Dortier : séquencer ses activités, se fixer des buts précis dans des délais limités, respecter un rythme alternant temps de travail et repos et faire respecter son rythme de travail.
Donner la parole aux travailleurs et repenser le management
Au delà des solutions à appliquer de manière individuelle, le sociologue et auteur Jean-François Dortier préconise d’autres solutions pour « survivre » au travail comme rendre le travail visible et le raconter en donnant la parole aux « invisibles ». Il propose également de repenser le management traditionnel pour aller vers de nouvelles formes de management (la bienveillance, le slow management…). L’auteur fait ainsi la part entre mythes et réalités autour de ces concepts et notamment de celui de l’entreprise libérée, pour enfin supposer que l’avenir du travail – fin du salariat, ubérisation, robotisation… – n’est peut-être pas celui que l’on croit !